Selon une étude de l’INRAE, un cheval passe en moyenne 16 heures par jour à paître. Mais l’herbe qu’il mange est-elle réellement adaptée à ses besoins ? Le pâturage représente la source d’alimentation la plus naturelle et essentielle pour les chevaux. Cependant, la simple notion d' »herbe » cache une diversité de variétés, chacune ayant des caractéristiques nutritionnelles distinctes qui peuvent influencer significativement la santé, la performance et le bien-être de votre cheval. Comprendre ces disparités est crucial pour optimiser son alimentation et prévenir certains problèmes de santé comme la fourbure.
Dans cet article, nous explorerons les principales variétés d’herbe pour chevaux, leurs avantages et inconvénients, et comment les choisir en fonction de vos besoins spécifiques. Nous aborderons les facteurs essentiels à considérer, tels que le type de cheval, son utilisation, le climat et le type de sol, afin de vous aider à créer un pâturage sain et équilibré qui réponde aux exigences nutritionnelles de vos équidés. Notre objectif est de vous guider dans la création d’un environnement de pâturage optimal pour vos chevaux.
Comprendre les bases : les différents types d’herbes pour chevaux
Avant de choisir les espèces fourragères pour votre pâturage, il est essentiel de comprendre les bases de leur classification et leurs caractéristiques principales. On distingue principalement les graminées (éléments clés des prairies), les légumineuses et les herbes aromatiques, chacune apportant des bénéfices spécifiques à l’alimentation du cheval. Ces éléments, combinés, permettent de créer un système de pâturage diversifié et adapté.
Les graminées : fondations du pâturage équin
Les graminées constituent la base de la plupart des pâturages pour chevaux. Elles sont appréciées pour leur teneur en fibres, leur apport énergétique et leur appétence. Elles se divisent en deux grandes catégories : les graminées pérennes, qui persistent plusieurs années, et les graminées annuelles, qui doivent être ressemées chaque année. Les graminées pérennes sont généralement préférées pour les pâturages en raison de leur durabilité et de leur capacité à résister au piétinement. Il est important de choisir des variétés adaptées au climat et au type de sol de votre région pour assurer une bonne productivité et une valeur nutritionnelle optimale.
- Graminées pérennes : Persistant plusieurs années, idéales pour les prairies établies et résistantes.
- Graminées annuelles : Nécessitant un ressemis annuel, utiles pour des pâturages temporaires ou des cultures dérobées.
On distingue également les graminées de saison fraîche (C3) et les graminées de saison chaude (C4). Les graminées C3, comme le ray-grass anglais et la fléole des prés, sont adaptées aux climats tempérés et froids et ont une croissance optimale au printemps et à l’automne. Les graminées C4, comme le sorgho fourrager, sont plus adaptées aux climats chauds et secs et ont une croissance optimale en été. Le choix entre ces deux groupes dépend donc de votre région et de la saison de pâturage. Par exemple, en Normandie, les graminées C3 seront privilégiées, tandis qu’en région méditerranéenne, une combinaison des deux peut être envisagée.
Espèce Fourragère | Description | Avantages | Inconvénients |
---|---|---|---|
Fléole des prés (Timothy) | Graminée pérenne, haute et à épis cylindriques. ![]() |
Haute digestibilité, faible en fructane, idéale pour les chevaux sensibles. | Peu productive, sensible au piétinement intense. |
Ray-grass anglais | Graminée pérenne à croissance rapide. ![]() |
Bonne production, pousse rapidement après le pâturage. | Potentiellement riche en fructane, risque de fourbure si consommée en excès. |
Dactyle aggloméré | Graminée pérenne, forme des touffes. ![]() |
Tolérance à la sécheresse, bonne production. | Peut devenir grossier et moins appétent avec l’âge. |
Fétuque élevée | Graminée pérenne, bonne résistance au froid. ![]() |
Résistance à la sécheresse, bon rendement. | Risque d’endophyte (champignon) qui peut causer des problèmes de reproduction. |
Pâturin des prés | Graminée pérenne à faible développement. ![]() |
Adaptation à des sols pauvres, bonne appétence, tolérant au pâturage intensif. | Faible rendement. |
Les légumineuses : source de protéines et enrichissement du sol
Les légumineuses, comme la luzerne et le trèfle, sont des plantes riches en protéines et en calcium, qui contribuent à enrichir le sol en azote grâce à leur capacité de fixation de l’azote atmosphérique. Elles sont particulièrement bénéfiques pour les poulains en croissance, les juments en gestation et lactation, et les chevaux de sport ayant des exigences élevées en protéines. Toutefois, il est important de les introduire progressivement dans l’alimentation du cheval et de les limiter en quantité, car elles peuvent provoquer des ballonnements ou, en cas d’excès, augmenter le risque de fourbure chez les chevaux sensibles. Selon une étude publiée dans le « Journal of Equine Veterinary Science », un apport excessif de légumineuses peut perturber l’équilibre intestinal.
- Luzerne (Alfalfa): Très riche en protéines et calcium, idéale pour la prise de masse, mais à consommer avec modération en raison des risques de coliques et de fourbure.
- Trèfle blanc : Améliore la fertilité du sol, bonne appétence, risque de ballonnements si consommé en grande quantité.
- Trèfle rouge : Fixe l’azote, bonne production, risque de photosensibilisation chez certains chevaux.
- Lotier corniculé : Tolérance aux sols pauvres, ne provoque pas de ballonnements, une alternative intéressante au trèfle.
Les herbes aromatiques et autres plantes : biodiversité et bien-être
La présence d’herbes aromatiques et d’autres plantes dans le pâturage contribue à la biodiversité et peut apporter des bienfaits supplémentaires à la santé du cheval. Certaines plantes, comme le pissenlit, sont riches en minéraux (potassium, calcium et magnésium), tandis que d’autres, comme le plantain lancéolé, possèdent des propriétés anti-inflammatoires et cicatrisantes. Il est donc important de favoriser la diversité végétale dans le pâturage, tout en veillant à contrôler la présence de plantes toxiques pour les chevaux, telles que la séneçon de Jacob.
Plante | Description | Bénéfices potentiels | Précautions |
---|---|---|---|
Pissenlit | Plante commune à feuilles dentées. ![]() |
Riche en minéraux (potassium, calcium, magnésium). | À consommer avec modération en raison de son effet diurétique. |
Plantain lancéolé | Plante à feuilles longues et étroites. ![]() |
Propriétés anti-inflammatoires et cicatrisantes. | Aucune précaution particulière connue. |
Achillée millefeuille | Plante à fleurs blanches regroupées en corymbes. ![]() |
Propriétés astringentes et hémostatiques (aide à arrêter les saignements). | Déconseillée aux juments gestantes. |
Choisir l’herbe adaptée à votre cheval : facteurs clés à considérer
La sélection de l’herbe pour votre cheval ne doit pas être laissée au hasard. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte, notamment le type de cheval, son utilisation, le climat et le type de sol de votre région. En tenant compte de ces éléments, vous pourrez concevoir une prairie sur mesure qui répondra aux besoins spécifiques de vos équidés et contribuera à leur bien-être général.
Type de cheval : adapter l’herbe à ses besoins
Les besoins nutritionnels varient considérablement en fonction du type de cheval. Les poulains en croissance ont une nécessité d’une alimentation riche en protéines (14-16%) et en calcium (0.6-0.8%) pour favoriser leur développement osseux et musculaire. Les chevaux de sport ont une exigence d’un apport énergétique important (jusqu’à 30 Mcal/jour pour un cheval de CSO de haut niveau) pour soutenir leur activité physique intense. Les juments en gestation (dernier trimestre) ont une augmentation des besoins en protéines de 20% et en calcium de 50%. Les chevaux obèses ont besoin d’un rationnement de l’herbe et l’utilisation de filets à foin à petites mailles est recommandée. Les chevaux âgés ont besoin d’une alimentation facile à digérer pour compenser la diminution de leur capacité digestive. Ainsi, l’herbe doit correspondre précisément à la catégorie du cheval.
- Poulains en croissance: Privilégier les légumineuses comme la luzerne et le trèfle pour un apport optimal en protéines et calcium.
- Chevaux de sport: Opter pour un mélange de graminées et de légumineuses pour un équilibre entre énergie et protéines.
- Juments en gestation et lactation: Assurer un apport suffisant en nutriments essentiels avec des graminées de qualité et des légumineuses.
- Chevaux obèses ou prédisposés à la fourbure: Choisir des espèces fourragères à faible teneur en fructanes comme la fléole des prés.
- Chevaux âgés: Sélectionner des herbes digestes et tendres comme le ray-grass anglais jeune.
Utilisation du cheval : adapter le pâturage à son activité
L’activité du cheval a un impact significatif sur ses besoins nutritionnels. Un cheval de loisir qui passe la plupart de son temps au pré aura des besoins différents d’un cheval de compétition qui s’entraîne intensément. Un cheval de reproduction aura des besoins spécifiques pour optimiser sa fertilité et la qualité de son lait. Il est donc impératif d’adapter la composition de la prairie en fonction de l’activité et de la fonction du cheval. Le tableau ci-dessous illustre l’impact de l’utilisation sur les besoins nutritionnels.
Utilisation du cheval | Besoins nutritionnels spécifiques | Recommandations pour le pâturage |
---|---|---|
Cheval de loisir | Besoins modérés en énergie et protéines | Pâturage diversifié avec un bon équilibre entre graminées et légumineuses |
Cheval de compétition | Besoins élevés en énergie et protéines | Pâturage riche en graminées de qualité et complémentation si nécessaire |
Cheval de reproduction | Besoins accrus en vitamines, minéraux et oligo-éléments | Pâturage de qualité avec un apport suffisant en légumineuses |
Climat et type de sol : choisir les bonnes espèces
Le climat et le type de sol sont des facteurs déterminants dans le choix des espèces fourragères. Certaines variétés sont plus résistantes à la sécheresse, tandis que d’autres sont plus tolérantes à l’humidité. Certaines espèces s’adaptent mieux aux sols pauvres, tandis que d’autres préfèrent les sols riches et fertiles. Il est donc essentiel de choisir des espèces adaptées aux conditions locales pour assurer une bonne productivité et une valeur nutritionnelle optimale. Une analyse de sol permet de connaître les carences du sol et d’ajuster le choix des herbes et des amendements. L’utilisation d’une carte des zones climatiques peut également être utile.
Gestion du pâturage : optimiser l’utilisation de la ressource
La gestion du pâturage joue un rôle crucial dans la santé et la productivité de la prairie. Le pâturage tournant permet de laisser le temps à l’herbe de repousser et d’éviter le surpâturage, qui peut endommager la prairie et favoriser la prolifération des mauvaises herbes. La fauche permet de contrôler la hauteur de l’herbe et de favoriser la production de nouvelles pousses. Le sursemis permet d’améliorer la densité et la diversité de la prairie. La fertilisation, de préférence avec des engrais organiques, permet de maintenir la qualité du sol et la production d’herbe. Voici quelques techniques de gestion :
- Pâturage tournant : Diviser la prairie en plusieurs parcelles et faire pivoter les chevaux entre elles pour favoriser la repousse de l’herbe.
- Fauche : Couper l’herbe régulièrement pour maintenir une hauteur optimale et stimuler la croissance.
- Sursemis : Réaliser un semis de nouvelles espèces fourragères pour améliorer la diversité et la qualité de la prairie.
- Fertilisation organique : Utiliser du fumier ou du compost pour enrichir le sol et favoriser la croissance de l’herbe.
Budget : un investissement à long terme
Le coût des semences et de l’entretien de la prairie est un facteur à prendre en compte. Il est pertinent d’investir dans des semences de qualité pour un résultat durable. Il est également important de prévoir un budget pour la fertilisation, la fauche et le contrôle des mauvaises herbes. Toutefois, il est important de considérer que l’investissement dans une prairie saine et équilibrée peut se traduire par une réduction des coûts liés à l’alimentation complémentaire et aux soins vétérinaires. Une prairie bien gérée est un investissement rentable sur le long terme.
Les erreurs à éviter et les bonnes pratiques pour un pâturage sain
Pour garantir une prairie saine et équilibrée pour vos chevaux, il est important d’éviter certaines erreurs fréquentes et d’adopter de bonnes pratiques. Évitez la négligence de l’analyse de sol qui empêche d’identifier les carences et d’adapter la fertilisation ou le semis d’une seule espèce fourragère qui réduit la biodiversité et la résilience de la prairie. Évitez également le surpâturage de la prairie qui épuise le pâturage et favorise la prolifération des mauvaises herbes ou de ne pas gérer les mauvaises herbes qui diminue la qualité du pâturage et peut présenter un risque pour la santé des chevaux ainsi que de fertiliser avec des engrais chimiques en excès qui peut polluer l’environnement et déséquilibrer la flore de la prairie. Voici les bonnes pratiques à adopter :
- Négliger l’analyse de sol: Empêche d’identifier les carences et d’adapter la fertilisation.
- Semer une seule variété d’herbe: Réduit la biodiversité et la résilience du pâturage.
- Surpâturer le pâturage: Épuise le pâturage et favorise la prolifération des mauvaises herbes.
- Ne pas gérer les mauvaises herbes: Diminue la qualité du pâturage et peut présenter un risque pour la santé des chevaux.
- Fertiliser avec des engrais chimiques en excès: Peut polluer l’environnement et déséquilibrer la flore du pâturage.
Parmi les bonnes pratiques, on peut citer la rotation des pâturages, la gestion de la hauteur de l’herbe, le contrôle des parasites internes, la surveillance de l’état corporel des chevaux et la complémentation si nécessaire avec du foin, des minéraux et d’autres compléments alimentaires. Une gestion attentive et proactive du pâturage est essentielle pour assurer la santé et le bien-être de vos chevaux. Un calendrier de rotation régulier est bénéfique.
Mélanges de semences adaptés à différentes situations : exemples concrets
Pour illustrer l’importance du choix des variétés d’herbe en fonction des besoins spécifiques, voici quelques exemples de mélanges de semences adaptés à différentes situations :
- Mélange pour chevaux de sport en climat tempéré: Ray-grass anglais (40%), fléole des prés (30%), trèfle blanc (30%). Ce mélange favorise une bonne production d’herbe, une bonne digestibilité et un apport équilibré en énergie et en protéines. Adapté aux régions comme la Bretagne ou la Normandie.
- Mélange pour chevaux sensibles à la fourbure en climat sec: Fléole des prés (50%), dactyle (30%), lotier corniculé (20%). Ce mélange privilégie les variétés à faible teneur en fructanes et résistantes à la sécheresse. Idéal pour les régions sèches comme la Provence.
- Mélange pour poulains en croissance en climat froid: Luzerne (40%), pâturin des prés (30%), trèfle rouge (30%). Ce mélange apporte une quantité importante de protéines et de calcium, essentiels à la croissance des poulains. Convient aux régions montagneuses comme les Alpes.
Un pâturage optimal : la clé de la santé équine
Choisir la bonne herbe pour vos chevaux est bien plus qu’une simple question de pâturage. C’est un investissement direct dans leur santé, leur bien-être et leurs performances. En prenant en compte leurs besoins spécifiques, le climat de votre région et les caractéristiques de votre sol, vous pouvez créer une prairie sur mesure qui leur fournira une alimentation équilibrée et contribuera à prévenir de nombreux problèmes de santé, notamment la fourbure, selon l’AVEF. N’oubliez pas que la gestion globale de la prairie est tout aussi importante que le choix des espèces fourragères. En adoptant des pratiques durables et en surveillant attentivement l’état de vos chevaux, vous leur offrirez un environnement sain et une vie pleine d’énergie. Un pâturage bien pensé est synonyme de chevaux en pleine forme.